Les rêves c'est le paradis à notre stade actuel.
Il n'y a plus les choses de l'ordre des tares, des vices, des habitudes nocives ou des craintes irrationnelles. Il n'y a plus la douleur. Il n'y a plus les handicaps. Tout cela a été résolu. Il ne reste que les avancées encore à faire dans son progrès spirituel.
Les situations de craintes qui se résolvent, le ont pour la première fois et une fois pour toutes.
C'est le fruit du travail qu'on fait pendant qu'on est éveillés, pendant qu'on est vivants. L'expérience permet d'avancer et d'acquérir les objets qui servent à modeler la conscience. Que le quotidien soit composé de vieux objets de ferraille ou de jolies lignes de code, ce sont ces objets qui sont utilisés pour progresser.
Cela a un rapport étroit avec ce que devrait être la société. Elle devrait avoir résolu les questions d'ordre logistiques et pratiques pour ne laisser à l'humain qu'à se préoccuper de ce qui fera avancer la société. Si comme actuellement la majeure partie de l'occupation quotidienne est axée sur la survie à court-terme, il n'y a plus beaucoup de place pour le progrès. Or, le progrès a lieu, le temps avance, l'histoire se déroule, et on peut être en retard par rapport à l'histoire, on peut avoir un retard évolutif. La technique elle, continue son progrès ; la pensée continue son progrès. Ce qui hier était acceptable car habituel peut devenir frustrant et aliénant. Le progrès est nécessaire. Certaines personnes veulent répondre à ce retard par une régression mentale générale, afin de trouver un équilibre, partant du principe que les autres progrès sont inaccessibles, utopiques. Mais c'est faux. Ils sont bloqués pour une raison systémique. Le monde doit changer. Il a besoin de changer. En mal ou en bien, il devra changer. S'il change en mal, on dira qu'il prend un autre angle d'attaque pour progresser. S'il change en bien enfin, il s'approchera plus du point auquel on doit être., où on peut s'occuper de ce qui est à notre hauteur.
La question fondamentale, systémique, dont découle cette réflexion, est celle du système social. Dans tout système il y a une part de l'effort consacrée à maintenir en vie le système, et une autre part de l'effort consacrée à ce que doit faire le système, ce à quoi il sert, et là où il nous emmène. Et évidemment le système dont on parle n'a aucune de ces perspectives, il ne sert qu'à exister par lui-même, sans aucune autre raison d'être. Il n'a pas été pensé. Il n'a pas de but. Ses buts sont des sous-buts involontaires dont les gens peuvent profiter pour les fois où ils ont une vie confortable, mais ceci au détriment des autres et de son propre futur.
En admettant qu'un système consacre 50% de son énergie à sa maintenance et 50% à l'expression de ses buts, comme une mobylette est censée "marcher" et puis aussi "avancer", en transportant son propre poids, alors on a un rendement qu'on peut considérer comme très passable, à peine suffisant. Si comme le corps humain seuls 3% de son énergie est consacrée à sa propre maintenant et le reste est disponible pour l'esprit qui le chevauche, afin qu'il puisse mener à bien ses tâches quotidiennes sans trop se soucier de son corps, alors on a un bon rendement. Il y a beaucoup d'exemples dans la nature d'adaptation des espèces afin de maximiser ce rendement. Le cerveau lui aussi, tente en permanence d'économiser l'énergie consacrée à son propre fonctionnement, mais ça c'est encore une autre histoire.
Mais si comme dans cette société on consacre 97% de notre énergie à faire que le quotidien puisse exister, à survivre au jour-le-jour, à travailler pour rembourser la nourriture qu'on consomme pour travailler, en admettant que toutes les autres choses sont correctement en place et suffisantes, alors c'est un très mauvais rendement. Si on se demande "Où va la société ?", la réponse est évidemment "nulle part", si personne n'a d'autre but plus éloigné que son propre présent.
Si on admet que dans un système la maintenance ne doit pas excéder, disons 20% de l'énergie du système, alors d'office il est question de résoudre une fois pour toutes les tâches usuelles par un automatisme dont le fonctionnement libère toute cette énergie humaine. L'alimentation, le logement, l'éducation, la santé, et les biens courants devraient être le fruit d'un automatisme tel que personne n'a à s'en soucier, quantitativement autant que qualitativement.
C'est difficile de promettre un monde dans lequel aura réellement lieu ce qu'on s'imagine seulement avoir lieu dans le monde actuel, aliéné. On a déjà eu la récompense et le confort sans avoir à faire l'effort. C'est très nocif. Quand la réalité vient frapper à la porte, on s'étonne : Comment cela ? On ne peut pas manger ? On ne peut pas habiter ? On ne peut pas acquérir n'importe quel bien les yeux fermés sans devoir se soucier d'un nombre incalculable de paramètres qui en font autant d'arnaques à éviter ? On ne peut pas "avoir confiance" ? Ils fabriquent même une sorte de bienséance qui consiste à accepter l'inacceptable en se disant "bon citoyen" qui ne cherche pas les ennuis. Et donc, à continuer à vivre dans une illusion dont les murs se referment.
Pour ressentir tous les effets du confort de vivre dans un monde rationnel, il faut soi-même être rationnel. Pour être rassuré par un système fonctionnel, il faut soi-même avoir la crainte que le système ne le soit pas. Pour être satisfait par le progrès, il faut soi-même y avoir contribué. Et pour que soient beaux les rêves qui se réalisent, il faut oser rêver le plus haut et le plus loin possible !